Le Vélodrome a connu bien des soirées sombres, mais celle du mercredi soir face au Sporting CP restera dans les mémoires comme l’une des plus douloureuses de l’histoire récente de l’Olympique de Marseille. Battus 3–1 à domicile après avoir mené au score, les Marseillais ont sombré dans une confusion tactique et mentale que Jean-Louis Gasset, ancien entraîneur du club, n’a pas hésité à qualifier de « tache indélébile sur le football français ». Ses propos, empreints de colère et de déception, résonnent comme un cri d’alarme pour un club qui semble avoir perdu son âme.

Tout avait pourtant bien commencé. Portés par un public incandescent, les hommes de Francesco Farioli avaient ouvert la marque dès la 14e minute, laissant espérer une soirée européenne maîtrisée. Mais à mesure que le match avançait, l’OM s’est délité. Les passes manquées, les replis tardifs et l’absence totale de cohésion ont rapidement donné l’avantage psychologique aux Portugais. Le tournant du match est survenu à la 63e minute, lorsqu’Emerson Palmieri, déjà averti, a reçu un second carton jaune pour simulation dans la surface adverse. Son exclusion a brisé le fragile équilibre de l’équipe et offert au Sporting un boulevard vers la victoire.
Pour Gasset, cet incident est symptomatique d’un mal plus profond : « Ce n’est pas seulement une erreur individuelle, c’est un manque de respect envers le maillot, envers l’institution. Quand on porte les couleurs de Marseille, on ne se jette pas au sol en espérant tromper l’arbitre. On se bat. » Des mots durs, mais justifiés selon de nombreux observateurs qui pointent du doigt le comportement immature du défenseur italien. Sa sortie a laissé ses coéquipiers désemparés, incapables de réagir collectivement face à un adversaire qui, lui, n’a jamais cessé d’y croire.
Mais Palmieri n’est pas le seul dans le viseur de l’ancien coach. Leonardo Balerdi, titularisé en charnière centrale, a lui aussi livré une prestation catastrophique. Mal positionné sur les deux derniers buts portugais, il a enchaîné les approximations et perdu plusieurs duels aériens décisifs. « Quand on défend avec autant de passivité, on trahit tout un vestiaire », a encore fustigé Gasset. Le public du Vélodrome, d’ordinaire bouillant, n’a pas tardé à exprimer sa colère : des sifflets nourris ont accompagné chaque relance ratée du défenseur argentin dans le dernier quart d’heure.
Au-delà des erreurs individuelles, c’est toute l’approche tactique marseillaise qui interroge. Le schéma en 4-2-3-1, censé renforcer la stabilité défensive, a au contraire fragilisé la structure du jeu. Le milieu, dominé par la paire Ugarte–Morita, n’a jamais su imposer le rythme. L’OM a semblé orphelin d’un véritable leader sur le terrain, incapable de calmer le jeu ou de remobiliser ses partenaires après les coups durs. Ce vide émotionnel a, selon Gasset, « révélé l’absence d’une colonne vertébrale digne d’un club de ce standing ».
Les mots de l’ancien entraîneur ont provoqué un séisme médiatique. Certains y voient un constat lucide et nécessaire, d’autres une attaque trop frontale envers des joueurs encore jeunes. Mais tous s’accordent sur un point : cette défaite dépasse le simple cadre sportif. Elle met en lumière la fragilité psychologique d’un groupe en quête d’identité, ainsi que la distance croissante entre le club et ses valeurs historiques. « Marseille n’a pas seulement perdu un match », conclut Gasset, « il a perdu un peu de son honneur. »
Dans les travées du Vélodrome, le silence pesant qui a suivi le coup de sifflet final disait tout. Le Sporting célébrait sa victoire avec sobriété, conscient d’avoir profité d’un naufrage collectif plus que d’avoir triomphé d’un grand d’Europe. Pour Marseille, l’heure est désormais à l’introspection. Et pour les supporters, une certitude demeure : certaines défaites laissent des cicatrices qu’aucune victoire future ne pourra effacer.